En Afrique francophone, chaque jour la monnaie locale recule face à la défaillance des banques et à la pression de l’inflation. Le franc CFA, associé à l’économie européenne, est de plus en plus contesté.
Beaucoup ressentent qu’il réduit l’indépendance économique, et que compter uniquement sur lui limite les possibilités de leurs économies.
Il y a de plus en plus de jeunes diplômés et d’entrepreneurs, frustrés par les blocages bancaires et la lenteur des virements internationaux. De ce fait, ils se tournent vers la crypto comme un outil de contournement.
Une alternative face à l’inflation ?
Depuis 2024, les stablecoins comme l’USDT augmente considérablement leur présence en Afrique subsaharienne.
Les données de Chainalysis le confirment : près de la moitié des transactions cryptos utilisent ces actifs pour garder intacts le pouvoir d’achat ou faciliter des transferts entre pays.
Dans des régions où les prix grimpent considérablement et où l’accès au dollar est restreint, cette solution est attirante. Pour de nombreuses PME tournées vers l’exportation ou les prestations à distance, c’est même devenu une habitude.
Des usages concrets
En Côte d’Ivoire, au Cameroun, au Togo, on trouve aujourd’hui des indépendants, des commerçants, des étudiants qui utilisent la crypto de manière pratique.
Ils l’échangent via des plateformes comme Binance ou Yellow Card pour recevoir leur argent ou effectuer des achats sans devoir passer par les banques.
Ce jeton intégré à l’application Telegram compte plus d’un million de portefeuilles actifs, selon les statistiques officielles de la fondation TON. Les transactions se font simplement, avec un bot.
Certains États s’y intéressent de plus en plus. En 2022, plusieurs gouvernements, dont le Cameroun, et les deux Congo (RDC et RC) ont même commencé des discussions pour créer des stablecoins.
Last week at #Stablecon NYC!
At Stablecon NYC, our CEO Chris Maurice shared how #stablecoins are solving real-world challenges in Africa, from access to USD to seamless cross-border payments.
The tech is ready. Now it’s about liquidity, trust, and education. pic.twitter.com/lYJxCkrJyP
— Yellow Card (@yellowcard_app) June 12, 2025
Les risques bien réels
Pour beaucoup, la crypto reste risquée. Les variations de prix du Bitcoin ou de l’Ethereum peuvent provoquer des pertes soudaines.
Plus grave encore, l’absence d’éducation financière rend les populations vulnérables aux arnaques. Des projets comme Liyeplimal ont fait des victimes dans le passé.
Une grande quantité d’applications ou de plateformes ne sont pas disponibles en français ou nécessitent des connaissances numériques minimales, ce qui représente un frein.
L’autre frein majeur reste l’infrastructure : sans couverture internet ou électricité fiable, l’accès aux cryptos est impossible dans certaines zones rurales. Il reste beaucoup de travail à faire à ce sujet. La question se pose, comment développer un avenir dans la cryptomonnaie quand les besoins de bases sont instables ?
#RDC #Goma sans eau, sans électricité et avec un réseau Internet perturbé | Radio Okapi https://t.co/V3glbVxCzG
— Christophe RIGAUD (@afrikarabia) January 24, 2025
Réactions des États
La Centrafrique a officiellement adopté le Bitcoin en 2022. Cependant, la réalité du terrain reste un problème important. Par exemple, l’accès limité et le manque de commerçants équipés réduit l’impact réel. Par conséquent, le Bitcoin n’est plus une monnaie officielle à ce jour, mais il reste légal.
Plusieurs autres pays font de leur mieux pour rester vigilants : au Cameroun, on met en garde ; au Sénégal, on surveille. Pendant ce temps, l’UEMOA n’a pas pris de décision unanime.
Une promesse à encadrer
La crypto permet à une génération connectée d’échapper aux circuits bancaires formels et de s’inscrire dans une économie mondiale. Mais sans éducation, sans cadre juridique, sans infrastructures solides, ce potentiel reste fragile.
Ce pourrait être un tremplin vers plus d’autonomie, à condition de ne pas laisser place à l’aventure sauvage.
Pour que cela fonctionne, il faudra aussi que les acteurs du secteur localisent davantage leurs outils et investissent dans la formation. Car sans compréhension, pas d’adoption durable.
Finalement, cela représente un autre exemple de la nécessité d’intégrer la cryptomonnaie dans le monde d’aujourd’hui, comme dans les années 1990-2000, lorsque l’accès à internet est devenu, avec le temps, un besoin.