Franchement, ce n’est pas une surprise totale.
Mais les chiffres ont de quoi faire froncer les sourcils : selon un rapport publié par Elliptic, plus de 21,8 milliards de dollars de fonds illicites ont circulé via des cross-chain swaps entre 2023 et 2025.
C’est trois fois plus qu’il y a deux ans. Et la tendance ne montre aucun signe de ralentissement.
Une nouvelle stratégie pour brouiller les pistes
Pendant longtemps, les criminels du web avaient leur plan tout tracé : mixers, plateformes offshore, quelques stablecoins bien placés… Puis, petit à petit, les régulateurs ont resserré l’étau.
Résultat ? Les mixers comme Tornado Cash ont été sanctionnés, fermés ou rendus inopérants. Fin du jeu ? Pas tout à fait.
Les ponts inter-chaînes (bridges) et les services de swap décentralisés sont devenus les nouveaux terrains de jeu.
On parle ici de conversions entre BTC, ETH, Arbitrum, Tron, Solana, etc. Sans contrôle. Sans vérification d’identité. Et souvent, sans même laisser de trace centralisée.
Certains cas récents, comme les transferts de fonds volés par le groupe Lazarus (attribué à la Corée du Nord), illustrent bien cette évolution.
Les fonds passaient de Bitcoin à Ethereum, puis à Arbitrum, Base, et enfin Tron. Le tout découpé en centaines de petites transactions. Invisible à l’œil nu.
+200 % en deux ans : les chiffres parlent d’eux-mêmes
D’après Elliptic, 21,8 milliards $ de cryptoactifs liés à des activités criminelles ont transité par ces circuits cross-chain. En juillet 2023, on était à peine à sept milliards.
En deux ans, le volume a explosé. Une croissance de +211 %. Disons-le franchement : c’est vertigineux.
Plus inquiétant encore, environ 12 % de ces fonds seraient directement ou indirectement liés à des activités cybercriminelles orchestrées par des États, principalement la Corée du Nord.
Pourquoi une telle efficacité ? Parce que ces swaps exploitent les failles de coordination entre les blockchains.
Un pont vers Arbitrum ici, un DEX là, un stablecoin gelé contourné par une conversion rapide… et voilà les fonds qui ressortent lavés.
📣 New Elliptic report: The state of cross-chain crime 2025 🔄
Great news! Our latest report, The state of cross-chain crime 2025, is now available.
Cross-chain crime, the anonymous movement of illicit crypto through DEXs, cross-chain bridges and no-KYC swap services, has… pic.twitter.com/7jjIvE8NhB
— Elliptic (@elliptic) July 16, 2025
Enquêteurs à la traîne, outils en renfort
Évidemment, tout cela ne passe pas complètement inaperçu. Les firmes spécialisées comme Elliptic, Chainalysis ou TRM Labs développent des outils capables de suivre les mouvements complexes entre chaînes.
Mais soyons honnêtes, la tâche est herculéenne.
Il ne suffit plus de suivre une adresse sur Ethereum.
Il faut maintenant tracer un flux qui passe par cinq blockchains différentes, avec des jetons qui changent de forme, de réseau, parfois même de propriétaire, en quelques secondes.
Les analystes parlent désormais de chain-hopping sophistiqué.
Un casse-tête technique et juridique, surtout quand les services utilisés ne sont pas soumis aux règles KYC/AML (connaissance client et lutte contre le blanchiment).
Une complexité qui ne fait que commencer
Disons-le clairement : l’interopérabilité entre blockchains est une avancée technologique. Mais elle s’accompagne d’un flou réglementaire que les criminels exploitent sans scrupules.
Si les tendances se poursuivent, les swaps cross-chain pourraient rapidement dépasser les mixers comme outil principal de blanchiment de fonds dans la sphère crypto.
Ce n’est pas une projection alarmiste. C’est la réalité d’aujourd’hui.
Les plateformes décentralisées, bien qu’innovantes, devront faire face à des choix. Garder leur promesse de liberté… ou s’adapter, sous pression, aux nouvelles exigences internationales.
Parce que tôt ou tard, quelqu’un devra rendre des comptes.